le 11/10/2018
-Comment réformer l’impôt sur les successions dont les règles paraissent majoritairement impopulaires dans un contexte ou les transmission s’accroissent en volume et en chiffre ?
L’éventualité d’une réforme des droits de succession a agité les esprits en septembre dernier, à la suite des déclarations du Délégué général de le République en Marche, Christophe Castaner qui appelait à « une réflexion sans tabou », sur les règles fiscales applicables aux successions afin notamment de lutter contre la progression des « inégalités de naissance » et de réformer un impôt sur les succession complexe, mal accepté et qui n’a pas su s’adapter à « l’évolution de la société » et aux « nouvelles formes familiales ».
Des règles critiquées
Si le Président de la République a très vite affirmé exclure toute réforme des droits de succession pendant l’actuel quinquennat, nombre de spécialistes appellent à revoir les règles actuelles qui prévoient l’application de barêmes progressifs pouvant aller jusqu’à 60% ainsi que des mécanismes d’abattements permettant aux successions de faibles montants et à celles entre époux ou entre parents et enfants d’être faiblement taxées.
En 2017, un rapport rédigé par France Stratégies, une institution rattachée au Premier Ministre a ainsi conclu à la nécessité d’une réflexion d’ensemble sur notre système fiscal actuel en matière de successions et de donations, vieux d’environ un siècle (1).
Deux objectifs devraient être assignés à cette réforme : limiter la perpétuation des inégalités d’une génération à la suivante et inciter à des transmissions plus précoces pour favoriser les jeunes. La question d’un patrimoine de départ minimum se pose également, si l’on veut favoriser l’inclusion des non-héritiers dans une société patrimoniale.
Un enjeu crucial
Les patrimoines se sont accrus et le nombre de transmissions de patrimoine a fortement augmenté depuis les années 1980. Aujourd’hui, le patrimoine transmis chaque année représente presque 20% du revenu des ménages. Les transmissions vont augmenter dans les prochaines années en volume comme en nombre d’une part parce que la population vieillit, et d’autre part parce que les patrimoines ont progressé plus vite que les revenus ces vingt dernières années en France.
L’âge moyen auquel on hérite devrait continuer à augmenter, passant de 50 ans aujourd’hui à 58 ans en 2050, du fait de la hausse de l’espérance de vie, ce qui freinera les transmissions aux plus jeunes générations. Le nombre des successions va ainsi progresser avec les décès intervenant au sein de la génération du baby-boom, plus nombreuse que les précédentes. Le nombre de décès annuels devrait passer de l’ordre de 550 000 avant 2015 à 650 000 en 2035, pour atteindre 750 000 après 2050 (2). Dans ce contexte, la fiscalité des successions et des donations constitue un enjeu majeur pour la société française.
Une fiscalité mal appréhendée
Dans cette perspective, en 2018, une étude a été publiée par France Stratégies visant à comprendre les préférences des ménages en matière de droit de succession (3). Premier enseignement bénéficier d’une transmission de patrimoine à titre gratuit constitue une situation minoritaire. En effet, seulement un sondé sur trois déclare avoir déjà bénéficié d’une donation ou d’un héritage supérieur à 5 000 euros et à peine un sur deux pense qu’il en bénéficiera à l’avenir. La transmission est fortement corrélée au niveau de revenu de l’héritier potentiel. Ainsi, les 20% les plus aisés ont 1,6 fois plus de chances que les 20% les plus modestes d’avoir déjà bénéficié d’une transmission et ils sont deux fois plus nombreux à considérer qu’ils bénéficieront d’une transmission à l’avenir. Une majorité écrasante, soit 87% des sondés estiment que l’impôt sur l’héritage devrait diminuer pour permettre aux parents de transmettre le plus de patrimoine possible à leurs enfants.
(1) www.strategie.gouv.fr, 2017/2027 – Comment réformer la fiscalité des successions ?, 2017
(2) Insee
(3) www.strategie.gouv.fr, Fiscalité des héritages : connaissances et opinions des Français, 2018