le 03/12/2021
-Sanctuariser tout ou partie du capital d’une entreprise, permettre aux actionnaires de pérenniser un modèle ou un projet d’entreprise et agir pour des œuvres ou des missions d’intérêt général : les atouts du fonds de pérennité.
Pour les dirigeants qui souhaitent pérenniser leur entreprise tout en soutenant des causes d’intérêt général, le législateur a créé en 2019 un outil dédié : le fonds de pérennité. Utile mais peu utilisé en raison de freins fiscaux, des propositions émergent pour l’améliorer.
Un instrument de transmission d’entreprise
Le fonds de pérennité a été imaginé par la loi Pacte de 2019 pour faciliter les transmissions d’entreprises familiales, un domaine dans lequel la France souffre d’une faiblesse structurelle. Le taux de transmission intrafamiliale y est inférieur à 20% alors qu’il atteint 51% en Allemagne et 80% en Italie.
Le fonds a vocation à recueillir les actions d’une ou de plusieurs entreprises transmises de manière irrévocable et gratuite, afin de contribuer à la pérennité économique à long terme de l’entreprise concernée. Il est une structure pouvant à la fois se comporter en tant qu’actionnaire actif et de long terme d’une ou plusieurs sociétés, et agir pour un œuvre ou un mission d’intérêt général.
Ce dispositif répond à un vrai besoin. Il est le seul outil disponible pour contrôler et animer une participation, tout en exerçant le cas échéant une activité caritative. Il se distingue en cela du modèle de la fondation reconnue d’utilité publique et le fonds de dotation.
Une fiscalité pénalisante à revoir
Pourtant, à l’heure actuelle, seuls trois fonds de pérennité ont été créés. En cause : un certain nombre de freins juridiques et fiscaux. Un rapport commandé par le ministre de l’Économie et le secrétaire d’État chargée de l’Économie sociale, solidaire et responsable propose de doper la fiscalité du fonds de pérennité afin de le diffuser plus largement. Rédigé par le président-directeur général du groupe Rocher, le rapport a été favorablement accueilli par le secteur.
En l’état actuel de la législation, l’apport, à titre de dotation, de parts ou d’actions de sociétés à un fonds de pérennité est une libéralité (donation) pour le fondateur personne physique, taxée à 60%. Le Pacte Dutreil peut s’appliquer à cette transmission (abattement de 75% de l’assiette des droits de donation ou de succession), ce qui aboutit à une imposition au taux de 15% de l’ensemble apporté au fonds. Ce taux est réduit à 7,5% dans le cas d’une donation au fonds des titres d’une société opérationnelle par une personne âgée de moins de 70 ans.
En revanche, lorsque le fondateur est une entreprise, son apport au fonds de pérennité est considéré comme une cession (pouvant bénéficier d’un sursis d’imposition sous certaines conditions) et une libéralité emportant le paiement de droit de donation gratuit à 60%.
Le rapport Rocher propose d’exonérer de droits de mutation à titre gratuit tous les apports de titre de sociétés au fonds de pérennité. À défaut d’une exonération complète, il pourrait être mis en place trois tempéraments fiscaux. Tout d’abord un régime de report d’imposition des droits de mutation à titre gratuit, sous réserve que le fonds de pérennité conserve les titres. Ensuite il conviendrait que le Pacte Dutreil s’applique aux apports réalisés par les entreprises. Enfin, l’abattement supplémentaire de 50% jusqu’ici réservé aux donateurs, personnes physiques ayant moins de 70 ans, pourrait être étendu aux personnes morales.